lundi 29 novembre 2021

La Guadeloupe en crise ! Quelques clefs pour comprendre.

 

La Guadeloupe est en crise, barrages, émeutes, incendies, tirs d’armes à feu. C’est un phénomène qui peut sembler récurrent, difficile à comprendre de l’extérieur, et aux racines complexes. J’y vis depuis bientôt 35 ans, et je vais m’efforcer de fournir ici quelques clefs de compréhension.


Le refus de l’« obligation » vaccinale

Comme partout dans le monde, l’arrivée rapide d’un vaccin présenté comme issu d’une technologie nouvelle a généré quelques inquiétudes bien compréhensibles… En Guadeloupe plus qu’ailleurs, dès le départ. De plus, maintenant qu’il est établi que le vaccin est efficace et que les vaccinés sont 8 à 9 fois moins contagieux et moins sujet à des formes graves, la méfiance s’apaise progressivement ailleurs, pas en Guadeloupe.

Et pourtant, de nombreuses familles sont touchées, les chiffres sont catastrophiques (jusqu’à 100 % de non vaccinés hospitalisés au début de l’automne), il y a des containers réfrigérés près des hôpitaux pour suppléer aux insuffisances de la morgue… mais rien n’y fait.

Dans cette population où, les réactions sont souvent passionnelles, il ne faut pourtant pas s’étonner d’une telle réaction.

- D’abord on se méfie de ce qui vient de l’extérieur. On ne se sent pas respecté par les autres populations, alors les rapports sont souvent empreints de suspicion. Avec cela, différentes croyances en des forces cachées sont encore très vivaces et cette combinaison des deux constitue un terrain idéal pour toutes les théories du complot, y compris les plus invraisemblables ! Et dans ce cas, la présentation d’arguments rationnels ne convainc pas, elle ne fait souvent qu’accentuer le déni.

- Ensuite le rapport à l’autorité est toujours compliqué ici. Plus que l’esclavage, les séquelles de la colonisation et la crainte du racisme font qu’elle est souvent mal vécue, délicate à exercer… Alors plus que la vaccination en elle-même, c’est l’« obligation » qui est impopulaire. On présente alors le gouvernement comme « colonial » et on choisit son camp en fonction de ce critère, quoi que dise la raison. Et plus qu’ailleurs encore, l’orgueil interdit tout retour en arrière, même devant l’évidence. Beaucoup de situations deviennent ainsi des impasses.

- Le scandale du Chlordécone renforce cette méfiance et est souvent employé pour la justifier. Mais c’est un argument à double tranchant :

En 1990, sous la pression d’un lobby antillais (planteurs de bananes), l’État a accordé une dérogation pour prolonger l’usage du chlordécone (démontré internationalement nocif) aux Antilles. Aujourd’hui, on lui reproche (à juste titre !) un manquement à son devoir de protection de la population.

Si aujourd’hui, à la demande d’un quelconque groupe de pression antillais, l’État en vient à accorder une dérogation sur la vaccination (alors que la non-vaccination est reconnue internationalement comme létale), l’Etat prend le risque de se voir reprocher à nouveau un manquement à son devoir de protection de la population.

Un dernier point mérite d’être soulevé. Si on raisonne au singulier et qu’on considère que le vaccin n’est qu’une protection personnelle, alors l’obligation vaccinale est évidemment un non-sens et inacceptable. Si on pense collectivement et donc que le vaccin est d’abord une façon de protéger son entourage (en diminuant la probabilité d’être un vecteur de contamination) et de participer à l’immunité collective, alors le vaccin est une évidence.
Or en Guadeloupe on pense peu collectif. Le discours face au vaccin le démontre, mais pas seulement. En sport, si la Guadeloupe a donné à la France un nombre impressionnant (même disproportionné) de grands footballeurs, la Guadeloupe en tant qu’équipe, est régulièrement éliminée aux premiers tours des compétitions nationales. C’est vrai aussi en cyclisme, où l’équipe de Guadeloupe se fait régulièrement dominer sur son terrain (Tour de Guadeloupe) par des équipes de seconde zone… Dans la vie courante, les Guadeloupéens sont souvent des gens très propres chez eux, mais le domaine public (collectif) est constellé de décharges sauvages et les canettes en tous genres s’accumulent sur les bords de routes… Enfin, en politique, des hommes corrompus sont systématiquement élus (et réélus) – j’y reviendrai - dans l’espoir d’obtenir un petit job, une petite faveur… Et tant pis si c’est l’argent public qui finance ces cadeaux et que la plupart des communes sont en faillite ! Ce sont les pays qui ont la plus forte conscience collective (Israël, Danemark…) qui ont été les premiers vaccinés.


La vie chère !

C’est un fait incontestable, et ceux qui ont séjourné en Guadeloupe le savent, le coût de la vie y est élevé (12,5 % en 2016 d’après l’INSEE, mais c’est un peu comme le froid, le ressenti est bien pire ! D'autant que l'alimentation - produit de première nécessité s'il en est - souffre d'un surcoût de 34 à 38% !). Les fonctionnaires qui touchent un sursalaire de 40 % s’en tirent bien, mais pour les autres, ceux du privé, dont les revenus sont souvent inférieurs à ceux de la métropole, c’est lourd à porter.

C’était la revendication principale du LKP lors des mouvements de grève de 2009 qui ont bloqué l’île pendant 2 mois. Mais cette crise n’a rien changé fondamentalement, et les analyses qu’on entend dans les médias laissent dubitatif !

Tout d’abord délégitimons deux fausses raisons souvent invoquées :

- C’est l’octroi de mer (taxe locale) qui rend tout plus cher. Faux. L’octroi de mer vient en remplacement de taxes nationales. Au lieu d’avoir 20 % de taxes d’état, Aux Antilles on a environ 10 % de taxe nationales + 10 % de taxes locales. L’octroi de mer n’engendre donc pas de surcoût significatif.

- L’éloignement des centres de production entraîne des frais de transport importants. Souvent faux. Ça ne coûte pas plus cher d’expédier une automobile ou un container d’ordinateurs du Japon ou de Corée, en Guadeloupe qu’en France métropolitaine. Pour les ingrédients ramenés en container de métropole, ce qui coûte cher c’est la containérisation et le dépotage, et ils sont comparables pour un trajet Strasbourg Paris ou Strasbourg Pointe-à-Pitre. Quant à la distance parcourue en cargo, elle coûte peu. Ramené à un paquet de biscuit au milieu d’un container, ce surcoût lié au parcours maritime et inférieur au centime d’euro !

- Ce qui explique le coût élevé des marchandises aux Antilles, ce sont les monopoles. Les familles des anciens colons (ceux qu’on appelle les békés en Martinique) possèdent la plupart des sociétés d’import-export, les grossistes et les chaînes de supermarchés. Alors ils pratiquent les prix qu’ils veulent, et les autres s’alignent. Quand Leclerc a cru flairer la bonne opportunité an Martinique, en observant qu’il était facile de casser les prix. Il s’est installé un an, puis a été prié de partir. Pas question de casser le marché. Les békés ont un monopole féroce de certains secteurs, comme l’agroalimentaire ou l’automobile.

La forte prise de participation du groupe Hayot dans le groupe Promodes (Carrefour) fait qu’il est un des rares franchisés à pouvoir se permettre de masquer les prix Carrefour (normalement imposés pour tous les magasins) par une étiquette au tarif supérieur.

Un exemple me paraît très représentatif de ces anomalies. Au début des années 90, acheter un ordinateur en Guadeloupe coûtait deux fois plus chers (200 %!) qu'en métropole. Dans ce secteur pas encore « réservé » un trouble-fête métropolitain est venu s’installer (PC Leader), offrant des ordinateurs à 120 % du prix métropole. Dans le mois tous les revendeurs locaux se sont alignés et continuent à vendre (aujourd’hui à peine plus cher qu’en métropole) en étant largement bénéficiaires. C’est dire les marges ahurissantes qu’ils se faisaient avant.

- Une autre cause des prix élevés, est la curieuse gestion des ressources et l’absence d’autonomie de l’île, notamment dans le domaine agroalimentaire, mais là encore l’influence des importateurs n’est pas un mythe. Et puis l’agriculture repose essentiellement sur la canne et la banane, produits d’exportation qui appauvrissent la Guadeloupe. Quand un planteur touche 3 euros pour ses bananes, il y a en fait 1 euro de vente réelle et 2 euros de subventions d’état, qui pourraient être utilisés utilement à autre chose qu’à faire survivre des plantations non concurrentielles. Parallèlement on importe tous les ans en Guadeloupe 10 000 tonnes d’agrumes… Cherchez l’erreur.


Le manque d’eau au robinet...

Là aussi c’est une réalité ! Le réseau d’eau est vétuste, perd un tiers de sa production dans les fuites, comprend encore des tuyaux en fibrociment, date des débuts de la départementalisation. Certaines zones ne sont desservies que par intermittence. Les piquages ont été bricolés au lieu d’être réparés après les cyclones. Non seulement la distribution est défaillante mais il est difficile d’avoir confiance dans la qualité de l’eau. D’où la consommation importante de bouteilles d’eau, vendues trois fois plus chères qu’en métropole.

Tout le monde le constate, et les responsables sont connus. Les réseaux d’eau ont depuis longtemps été gérés par des « syndics », Siaeg et autres. Ces entités sont créées par les communes et sous la responsabilité des élus locaux eux-mêmes élus par les Guadeloupéens. De nombreux scandales trop vite étouffés ont montré que la plupart des communes (plutôt mieux dotées qu’en métropole) ne finançaient pas ces syndics à hauteur des engagements et des besoins et que le peu d’argent que ceux-ci recevaient servait à financer des voyages ou des appartements aux cadres et aux élus qui les avaient nommés1.

L’exploitation de ces réseaux d’eau est confiée à des « fermiers » (Générale des Eaux, etc.) qui encaissent les paiements des usagers mais n’ont en charge que les réparations… Le financement du développement et de l’entretien préventif est parti dans les poches des politiciens locaux.


On touche là une des principales causes des difficultés de la Guadeloupe. Depuis des décennies, les Guadeloupéens votent pour des maires corrompus, et connus comme tels (parfois déjà condamnés!), parce qu’ils en espèrent un avantage personnel, au mieux un emploi dans la fonction publique (très bien rémunéré!). Le résultat est que les communes de Guadeloupe ont en moyenne trois fois plus d’employés communaux par habitant qu’en métropole (et bien payés, ce sont des amis…). Alors que les communes sont mal entretenues, il n’y a que des chefs ! Les deux tiers du budget communal passent dans la masse salariale et 30 communes sur 33 devraient être déclarées en faillite. Mais quand on vote pour un maire corrompu dans l’espoir de tirer profit de l’argent public à titre personnel, il ne faut pas s’attendre à ce que le reste du budget soit géré au bénéfice de la collectivité et que le maire ne se serve pas aussi pour lui !

Mais détourner de l’argent public (lajen léta) n’est pas ici considéré comme immoral… On s’en vante même, c’est une preuve de ruse et de bonnes relations !

Dans le scandale de l’eau, ce sont bien les électeurs guadeloupéens qui ont élu leurs édiles à qui ils ont confié la nomination des responsables de la gestion de l’eau qui ont mis le système en faillite. Ce sont bien les électeurs guadeloupéens qui ont créé cette situation et qui détiennent les clefs du changement… C’est même le principe de la démocratie, et la raison d’être du droit de vote.

Contrairement au discours à œillères de certains2, ça n’est pas « l’État colonial » qui porte la responsabilité des décisions des électeurs guadeloupéens. Si l’État à failli, c’est de fermer les yeux trop longtemps sur ces pratiques. Mais les Guadeloupéens n’aiment pas non plus que « la justice coloniale » condamne leurs élus…

 

Le malaise de la jeunesse…

Le malaise évoqué par certain et lui aussi palpable. Près de la moitié d’entre eux s’en va faire leurs études ailleurs, et beaucoup ne reviennent pas. Une fois qu’ils se sont fait un cercle d’amis là-bas, ils ont moins envie de venir affronter les difficultés de l’emploi en Guadeloupe.

Il est certain que l’insularité est une particularité souvent handicapante. Les perspectives d’évolutions sont limitées, la Guadeloupe faible exportatrice et grande importatrice ne produit qu’une partie de sa consommation. Certains métiers n’existent pas ou si peu qu’ils restent précaires. Beaucoup d’entreprises sont dépendantes de marchés publics, ou au mieux d’un marché réduit et fermé…

En conséquence, les postes sont rares, donc chers, et comme partout, il est bon d’avoir des appuis, pour chaque poste qui s’ouvre il y a des dizaines de candidats, et certains ont des appuis sérieux. Celui qui n’en a pas n’a aucune chance, quels que soient ses atouts par ailleurs.

Pire l’institution des 40 % (sursalaires des fonctionnaires) a totalement faussé la donne. En Guadeloupe tu es fonctionnaire, tu gagnes bien ta vie, tu as la sécurité de l’emploi et les horaires réduits. Si tu travailles dans le privé, tu es payé au lance-pierre pour un emploi souvent précaire, qui dépend de l’humeur du patron. Pas étonnant que dans un tel contexte, l’« ambition » d’un jeune, c’est d’être fonctionnaire, pas de contribuer au développement économique de son pays. Mais là aussi les postes sont chers et le mérite d’un candidat ne pèse pas lourd3. Le résultat est une administration pléthorique, où les compétences ne sont jamais prises en compte et où tout le monde doit quelque chose à quelqu’un.

La création d’entreprise n’est pas non plus le recours qu’elle pourrait être. Ça peut marcher pour une entreprise grand public, comme les restaurant, mais si une entreprise marche bien et qu’elle est sur un marché spécifique, il est fréquent qu’un concurrent s’installe avec des appuis plus solides et coule celui qui a créé l’activité soit grâce à ses relations soit avec des pots-de-vin.

Ce système hyper clientéliste laisse peu de place à une jeunesse qui n’a pas de réseau familial. C’est à la fois un plafonnement de la compétence et donc de la qualité des services et surtout une machine à créer des exclus.

Le problème est que le gouvernement appelé à la rescousse à peu de moyens d’intervention dans ce domaine, à part peut-être un peu plus de vigilance dans l’embauche dans la fonction publique nationale… Le malaise est bien local ! Cette mainmise sur l’embauche est un élément de pouvoir des élus locaux… Ils n’ont aucune envie que les choses s’améliorent…

Une autre voie de progrès pourrait être le développement de secteurs d’activités faciles à exporter (comme l’informatique, les huiles essentielles…) ou de développer les pôles touristiques. Mais là encore les politiques qui devraient être les moteurs de ce genre de projets, sont pour la plupart issus de la fonction publique et n’ont jamais créé un emploi productif ou pris un risque entrepreneurial de leur vie…

Les idées passent parfois germent… rien ne se fait.

La commune où j’habite est tout à fait représentative de cette situation. Il y a 7 500 habitants et plus de 300 employés municipaux (pour une moyenne de 100 pour 10000 habitants en métropole…) et on continue d’embaucher4. Beaucoup ne travaillent que quelques heures par semaine5, et la commune manque visiblement d’entretien. Le maire habite une autre commune ne vient parfois qu’une demi-journée par semaine. La commune dispose de nombreux atouts : ruralité, centre de plongée réputé, emplacement idéal pour le nautisme itinérant, possibilités de randonnées, nombreux couchages sous forme de gîtes, communications routières, etc. Le maire actuel s’est fait élire en 2014 et 2020 avec un projet de « Station Nautique » ; idée qu’il a piqué à un de ses adversaires en cours de campagne, et pour laquelle il a fait voter de nombreux budgets… aujourd’hui consommés en frais divers. À ce jour rien n’a été fait, et la ville végète toujours sans perspective pour ses jeunes.

Le potentiel est là. Mais la seule façon de le faire évoluer c’est d’arrêter d’élire des politiciens aussi incompétents que corrompus. Les clefs sont bien dans les mains des Antillais.

Et puis, constituer des entités économiques qui amèneront la Guadeloupe à une économie plus équilibrée… commence par ne pas saboter le tissu économique tous les 10 ans !


Une réalité syndicale spécifique…

Il y a plusieurs syndicats représentés en Guadeloupe, mais celui qui fait le plus parler de lui et est à l’origine des mouvements du LKP en 2009 ou des barrages d’aujourd’hui, c’est l’UGTG.

Ce syndicat se distingue de l’idée qu’on se fait d’un tel organe à bien des égards.

- D’abord parce qu’il est coutumier d’agissements violents6

- Ensuite parce que l’idéologie affichée est contradictoire. Ce syndicat affiche des opinions clairement indépendantistes, mais en même temps la plupart de ses revendications portent sur plus de subventions et de financement d’état, plus d’embauche d’état, plus d’intervention d’état sur des problématiques purement locales…

- Et puis parce que ces exigences de résultats auprès de l’état n’en font pas une force de proposition et jamais un élément constructif. En 2009, le LKP disait vouloir lutter contre la vie chère. Mais les causes réelles (et locales) de cette cherté n’ont jamais été abordées. Au bilan de ce mouvement une prime de 200 € provisoire, et bien vite avalée par la non-augmentation des salaires, et une liste de 100 produits – dits de première nécessité – aux prix encadrés provisoirement. Ironie qui en dit long : cette liste a été établie par les békés eux-mêmes ! Elle comprenait le Tilleul menthe…
Mais rien pour démanteler les monopoles. Et 12 ans après rien n’a changé

- Et encore, des intérêts défendus pour le moins ambigus. Comme en 2009 l’UGTG (qui rassemble essentiellement des fonctionnaires touchant les 40 % ) fait le pari de laisser pourrir la situation, avec de nombreuses exigences de pure forme avant, d’accepter de négocier. On est à l’évidence bien plus dans le rapport de force que dans la recherche de solutions. Malheureusement (mais logiquement), en 2009 l’état comptait aussi sur la lassitude des habitants et le pourrissement de la situation. L’île a été bloquée deux mois, mais le mouvement de grève en lui-même n’a duré que 44 jours… pour préserver le trimestre de retraite des fonctionnaires grévistes7. Mais dans un même temps, dans chaque île, près de 1000 entreprises ont fait faillite, et 10 000 salariés ont perdu leur emploi.

C’est une constante de ces mouvements sociaux menés par l’UGTG (mais c’était aussi le cas des gilets jaunes) : les victimes de ces mouvements sociaux sont toujours les Guadeloupéens, des salariés Guadeloupéens, des malades Guadeloupéens qui n’accèdent pas aux soins, des artisans Guadeloupéens… des Guadeloupéens qui souffrent… personne d’autre ! Qui peut croire que cette catastrophe économique provoquée délibérément sert à aider les Guadeloupéens à sortir du marasme ?

Interrogé, après le LKP, par la télé locale sur le sort des employés des centres commerciaux restés sans salaire plus de deux mois, Elie Domota, fonctionnaire protégé de Pôle emploi a répondu en balayant la question d’un revers de main «qu’on leur trouverait un emploi… »… en pleine crise !

Cependant si vous évoquez la responsabilité des Guadeloupéens dans leurs difficultés ou émettez le moindre doute sur le fait que L’UGTG représente les Guadeloupéens contre l’« État Colonial », vous serez immédiatement classé « kolonialist » et vos arguments ne seront pas écoutés.

- Enfin, les méthodes et des résultats restent discutables. Si le LKP était plutôt soutenu par la population Guadeloupéenne, qui en attendait une amélioration de ses conditions de vie, le mouvement d’aujourd’hui peine à fédérer. Il faut dire que le bilan de ces manifestations laisse perplexe :

- Aucune avancée significative sur le long terme… (la vie chère a disparu ? Les monopoles qui piègent l'économie locale ont-ils été modifiés depuis 2009 ? pourquoi ?).

- Effondrement du tissu économique, pourtant seul capable de sortir l’île du marasme.

- Chômage et faillites.

- Renforcement du déséquilibre public/privé (et donc renforcement du pouvoir de blocage des syndicats bien implantés dans la fonction publique).

- Atteintes aux droits de circuler des citoyens. Les pseudo-défenseurs de leur liberté n’ont aucune considération pour celle des autres… ici comme ailleurs.

- Morts médicaux (essentiellement des dialysés qui n’ont pas pu se rendre au centre, des malades qui n’ont pas reçu les soins à temps, ou des malades hospitaliers morts parce que l’anesthésiste ou le chirurgien n’a pas pu se déplacer)8.

- Une image durablement ternie pour le tourisme (spécialement cette année ou les exactions sont bien plus médiatisées qu’en 2009), mais aussi pour la Guadeloupe et les Guadeloupéens en général (le pillage de boutiques ciblées et le spectacles de types jouant aux durs en se cachant derrière des cagoules est souvent jugé sévèrement par les observateurs extérieurs).

- Fermetures des écoles (moins que pour le Covid à ce jour, mais fallait-il en rajouter?)

Sans compter les « dommages collatéraux »

- Vandalisme ciblé (bijouteries, téléphonie, banques…) nocturne.

- Incendie de maisons et de commerces

- Présence de manifestants cagoulés et en arme sur les « barrages »

- Rançonnage des touristes et du personnel soignant.

Toutes choses qui tiennent de la délinquance et pas du mouvement social. pour ces derniers points, les mouvements et les syndicats qui créent le désordre et les conditions de ces dérapages ne les revendiquent pas…Mais exigent après coup la libération des délinquants pris en flagrant délit.
(Je pense personnellement que si le gouvernement a choisi d’envoyer le GIGN et pas des brigades de CRS comme il est d’usage lors de simples mouvements sociaux, c’est que ses renseignements prévoyaient ces débordements, donc ceux-ci étaient planifiés).


Au delà de l’« obligation vaccinale » qui provoque des réactions hystériques ici et ailleurs, et sur lesquelles l’UGTG voudrait s’appuyer pour créer un deuxième LKP, les problèmes évoqués lors de ces mouvements sociaux sont réels.

Mais il est évident que d’autres intérêts utilisent ce malaise, et entretiennent une confusion dont résulte un curieux mélange de violence et d’inefficacité

En accusant systématiquement le « gouvernement colonial » (il est vrai coupable, au minimum, d’ignorance et de maladresse !) de tous les maux, ces mouvements violents contribuent fortement à cacher les causes profondes du malaise antillais, qui, sont le plus souvent locales et internes.



1    Dont la célèbre Lucette Michaux-Chevry, engoncé dans les scandales et les procès avant son décès.

2    Je pense bien sûr à l’exposé tendancieux de nombreux syndicalistes mais aussi par exemple, à la vidéo surprenante de Claudy Siar, présentateur de Radio parisien d’origine guadeloupéenne, qui pendant plusieurs minutes fustige à répétition « l’état colonialiste » pour des manquements… dans les tâches dues aux élus locaux. C’est bien sûr populaire de déresponsabiliser ainsi son auditoire et d’en faire des victimes.

3    J’ai participé personnellement (et avec succès) à deux processus nationaux de recrutement dans la fonction publique de Guadeloupe. J’ai même été présenté au personnel d’une de ces institutions comme leur futur manager. Mais les deux fois, au moment de l’embauche, un candidat appuyé par « en haut » a eu finalement le poste, sans participer à aucun processus de sélection.

4    Deux embauches encore prévues au conseil municipal de ce mois-ci...

5    C’est déjà beaucoup ! Sur les 500 employés embauchés par la communauté d’agglomération lors de sa création en 2014, 90 n’ont jamais mis les pieds à la communauté. Ils se contentaient de toucher un (gros) salaire.

6    On se souviens du tabassage du directeur d’un fast-food parce qu’il ne fermait pas lors d’un jour déclaré férié par l’UGTG, ou du vidage du carburant des camions de la raffinerie avec menace d’un briquet, d’employés forcés manu-militari de quitter leurs bureaux (et de grossir ainsi le nombre de grévistes!), etc...

7    Dans la fonction publique, à partir de 45 jours de grève, les fonctionnaires perdent un trimestre de cotisation retraite.

8    En 2009, j’étais en préfecture quand les premiers morts hospitaliers ont été signalés. Le lendemain une réunion de tous les syndicats concernés à été initiée par M.Ursulet (syndicat hospitalier) et l’emprise sur la raffinerie a été relâchée pour permettre (trop tard) l’approvisionnement des véhicules d’urgence. Ces données n’ont jamais été rendues publiques.


lundi 30 août 2021

Je veux qu’on m’explique…

 

 

On assiste aujourd’hui à un engouement et une forte promotion pour la voiture électrique. Si celle-ci donne bonne conscience à son propriétaire elle soulève pourtant techniquement un certain nombre de questions qui devraient rebuter les (vrais) écologistes !

Je passe sur la controverse1 existante sur l’impact écologique réel (production, extraction et importation de métaux rares, retraitement...) des grandes quantités de batteries nécessaires pour l’électrification du parc automobile. Il n’est évidemment pas négligeable mais ne constitue pas le principal handicap écologique de la voiture électrique !


Il est toujours surprenant d’entendre comment les partisans de ce type de véhicules feignent d’ignorer la source réelle d’énergie.

Dans nos pays où la part des énergies renouvelables (ou propres) est minoritaire et ne permet pas de satisfaire à la consommation de base des habitants, tout le surplus de consommation engendré par électrification du parc automobile, ne peut être produite que par les énergies "traditionnelles".

- En France métropolitaine, un conducteur de voiture électrique roule essentiellement au nucléaire

- En Guadeloupe (ou j’habite), il roule au fuel lourd…

Écolo ?

Mais surtout on ne prend jamais en compte la question du rendement…

Le rendement d’un moteur automobile est connu, et médiocre (42 % pour le diesel et 36 % essence) parfois un peu mieux sur les moteurs les plus modernes. Ce qui signifie que pour disposer d’1 kW aux roues, on est obligé d’en produire 2,5 fois plus (le surplus est dissipé, essentiellement sous forme de chaleur par le radiateur et dans les gaz d’échappement).


Celui d’une centrale électrique aussi : 30 % nucléaire (35 % EPR) et 35 à 40 % pour un groupe thermique2 (qui pollue au fuel lourd… ). Mais pour faire fonctionner votre véhicule il va falloir le transporter avec des pertes dues aux lignes (résistance électrique des câbles de transport) et aux multiples transformations (produit en 20 kV ou en 5 kV le courant est transformé en 64 kV ou 400kV puis à nouveau en 20 kV, 5 kV et 400V), et la distribution en triphasé/monophasé.
Si les transformateurs électriques sont munis d’ailettes de refroidissement c’est bien qu’ils dissipent de la chaleur (énergie perdue). Si, à sa charge nominale, le rendement d'un transformateur peut atteindre 99%, il peut descendre à 50% en cas de forte sous-charge. Or la charge d'un transformateur de distribution varie tout au long de la journée...

Chaque équipement entre la génératrice et la prise de recharge à un rendement propre, et les pertes se cumulent si bien qu'à la prise électrique de votre garage le rendement global de la production électrique est souvent inférieur à 20%

Et ça n'est pas fini ! Le convertisseur Courant Alternatif/Courant Continu nécessaire pour la recharge à un rendement entre 88 et 96%.
La batterie chargée ne restitue qu’une partie de l’électricité absorbée (rendement de 80 % au mieux pour des batteries neuves pouvant descendre à 50 % pour des batteries en fin de vie).

Et enfin le rendement du moteur électrique lui-même (90 % pour un synchrone, 75 à 80 % pour un asynchrone)…

En cumulant ces différentes pertes (en factorisant les différents rendements) on arrive à un rendement final inférieur à… 10 %. Autrement dit il faut produire au moins 10 kW d’énergie thermique dans une centrale électrique pour avoir 1 kW d’énergie mécanique aux roues d’un véhicule électrique…

À poids égal, une voiture électrique consomme donc 4 fois plus de carburant qu’un moteur thermique… Sauf qu’elle est souvent 1,5 fois plus lourde et demande donc plus d’énergie… pour les accélérations et les côtes…

Elle pollue donc potentiellement 5 à 6 fois plus…

Et ce avant même de parler de l’impact des batteries !

On peut pinailler sur les chiffres, même si la plupart sont facilement vérifiables… On pourrait aussi rajouter les coûts écologiques de la construction et de l'exploitation des installations (d'un côté comme de l'autre). Mais l’écart est bien d’un ordre de grandeur, pas "un peu plus" !

La voiture électrique est silencieuse, facile d'emploi, mais elle pollue beaucoup, est énergivore et n'est pas écologique...

Bien sûr cette pollution est « sortie » des villes pour être reportée au niveau des centrales, mais la planète en tire-t-elle avantage ?

Est-ce que 4 ou 5kW/h d'énergie nucléaire (relativement décarbonée), sont plus écologiques qu'1kw/Wh d'énergie pétrolière ?

Ça explique pourquoi certains gouvernements, obligés de répondre aux pressions politiques des écolos mais disposant d’ingénieurs multiplient les atermoiements sur le sujet…

Ou pourquoi certaines marques (comme Peugeot) sont restées très réticentes aux voitures électriques. Les ingénieurs étaient persuadés que le bon sens interviendrait.




L’écologie politique est monstrueuse d’incompétence et de d’aberrations.

Dans un post précédent je démontrais, chiffres à l’appui, que la fermeture des voies sur berges à Paris était la pire catastrophe écologique que Paris avait connue ces 50 dernières années et causait des milliers de morts.3

Dernièrement une autre mesure, elle aussi soutenu par les « écologistes » impose une vitesse de 30 km/h aux automobilistes parisiens. Si on peut attendre d’une telle mesure une baisse de la pollution sonore et peut-être une amélioration de la sécurité (peut-être pas vraiment significative par rapport à l’actuelle limite à 50 km/h… si elle était respectée), il est démontré qu’elle entraîne elle aussi une surpollution4. Et c’est facile à comprendre. Rajoutez-y comme à Grenoble où l’autophobie fait loi, de multiples chicanes et les véhicules sont en perpétuelle ré-accélération…


Il est certain qu’il nous faut repenser notre mode de transport, surtout en ville. Mais l’autophobie qui donne bonne conscience aux pseudo-écolos, n’est pas une solution, juste une posture stérile.


Le véhicule hybride

En mode autonome, le véhicule hybride (rechargeable) fonctionne comme une voiture électrique qui serait un peu moins lourde. Et pollue à peu près de la même façon.

Par contre en mode hybride, elle permet d’économiser un peu de carburant en récupérant une partie de l’énergie du freinage et en limitant la sollicitation du moteur thermique, et donc la surconsommation à l’accélération. Voilà pourquoi la plupart des constructeurs ont commencé à commercialiser leurs hybrides sans module de recharge (onéreux), jusqu’à ce que le politique s’en mêle…

Cette petite économie est réelle et déjà vraie pour ce qu’on désigne par « micro-hybridation », sensible sur des parcours urbain et négligeable sur un parcours autoroutier. Mais si le surcroît de puissance que fournit l’hybridation est utilisé par le constructeur (et le conducteur) pour augmenter les performances et la consommation d’énergie, alors le gain est nul, voir négatif !

 

 

1    https://www.greenly.earth/blog/empreinte-carbone-batterie
https://www.revolution-energetique.com/dossiers/lempreinte-ecologique-des-batteries-rumeurs-et-realites/

2    Un moteur thermique de centrale électrique peut atteindre un rendement de 50 % mais les chiffres ci-dessus sont ceux du groupe électrogène et prennent en compte le rendement de l’alternateur

3    https://philippedroger.blogspot.com/2020/10/

4    https://www.lepoint.fr/automobile/securite/30-km-h-en-ville-la-promesse-d-une-pollution-aggravee-26-08-2021-2440247_657.php

lundi 9 août 2021

Vaccins, la réponse de la nature et de l’Histoire…

 


Depuis maintenant des semaines, voire des mois, le débat autour du vaccin et de l’obligation vaccinale s’hystérise, de la mise en scène de décès, aux médecins qui se font menacer ou insulter1 et pire encore2 ! L’argumentation déployée témoigne, elle aussi, d’une volonté aveugle d’argumenter coûte que coûte pour son camp (biais de confirmation) plutôt que d’une réflexion qui nous permettrait d’y voir clair. Pourtant l’Histoire ne cesse de nous enseigner qu’aucun raisonnement, aucune argumentation, aucun militantisme ne peut s’affranchir des lois naturelles qui régissent la nature des choses. On compose avec elles, on ne transige pas. Alors pourquoi ne pas commencer par considérer l’incontournable avant de développer une théorie ou même un avis.

L’attaque d’une espèce, dite évoluée, par un virus, est un phénomène récurrent dans l’histoire de la vie et de l’humanité en particulier. Et il n’y a jamais eu que deux issues possibles :
- Soit l’espèce attaquée est incapable de développer des anticorps et l’espèce disparaît. C’est le virus qui a « gagné »...
- Soit, tout ou partie de l’espèce développe des anticorps. Ceux qui y parviennent créent une immunité collective qui rend impuissant le virus à se propager et détruire l’espèce. Suivant la virulence du virus, une partie de ceux qui n’y parviennent pas meurent, mais l’espèce survit. Dans ce cas, c’est l’espèce qui « gagne »…

S’il y a aujourd’hui des êtres humains sur terre c’est que toutes les générations qui ont conduit à l’homo sapiens et qui n'étaient pas confinées naturellement, ont su fabriquer cette immunité collective face aux différents virus qui l’ont attaqué...
La nature et l’histoire nous enseignent que :

La seule issue connue à une pandémie est l’immunité collective


L’époque moderne a néanmoins apporté 3 choses qui font évoluer la donne :

1) Une forte densité de population et des moyens de transport performants. Par le passé on pouvait restreindre une épidémie à une région du globe. Aujourd’hui quand un virus est identifié quelque part, il est déjà présent presque partout ailleurs. Ses capacités de propagation et de développer des variants sont boostées par notre mode de vie. Le Covid-19 illustre bien le phénomène

2) De nouvelles médications et parfois la connaissance de règles d’hygiène de vie qui permettent de lutter contre les effets du virus. Il ne s’agit souvent que de combattre les symptômes de la maladie (ce qui peut être suffisant quand la maladie n’est pas mortelle…). Les antiviraux constituent une technique difficile dans la mesure elle diffère pour chaque virus. Et aucune de ces médications n’est sans effet secondaire. La pandémie actuelle a remis en avant ces techniques, mais en a aussi montré les limites, que l’exemple malheureux de l’hydroxychloroquine illustre bien.

3) Les vaccins. Depuis Pasteur, on sait que plutôt que de bourrer un malade de médicaments plus ou moins efficaces et plein d’effets secondaires, on peut stimuler les défenses naturelles de l’organisme et ainsi provoquer son immunité par un vaccin. Le vaccin reste, comme le médicament un corps étranger et comme le médicament n’est pas dénué d’effets secondaires, et comme le médicament son efficacité n’est pas totale (à peine 50 % pour le choléra ou la leptospirose, 60 % en moyenne pour la grippe, 85 % pour la polio, et environ 95 % pour le Covid-193). Le tout variable suivant les individus.

Mais le confinement total étant illusoire, il reste un invariant malgré ces nouvelles donnes :

Seule l’immunité collective met fin aux attaques d’un virus.


Donc, un état confronté à une pandémie telle que le Covid-19 se doit de choisir entre :

- La vaccination générale (quand on dispose du vaccin !), qui suppose d’investir dans des moyens exceptionnels, de gérer les immanquables effets secondaires, de communiquer efficacement (!) ou utiliser la coercition, de faire face au pouvoir ou a l’enrichissement abusif des labos et aux dérives que peuvent entraîner les contrôles qui deviennent nécessaires.

- Laisser faire l’immunité naturelle (méthode Bolsonaro). Le problème avec cette méthode c’est que le nombre de victimes explose (comme aux Brésil) et que chez nous, personne ne veut assumer cette surmortalité, ni les gouvernements (on les voit mal dire : on a les moyens de vacciner mais on laisse faire) ni les opposants au vaccin… Pour endiguer le flux exceptionnel de malades graves et la surcharge fatale des hôpitaux, les gouvernements n’ont alors d’autre moyen que le confinement. Mais le confinement n’améliore pas l’immunité collective et ne diminue en rien sa nécessité, il ne fait que la retarder. Non seulement il a de graves conséquences économiques et sociales, mais en rallongeant le processus d’immunité, et donc la vie du virus, il permet l’apparition de plus de variants.

La semi-vaccination cumule les inconvénients des deux méthodes sans assurer l’immunité collective.

Si les décisions gouvernementales peuvent avoir un effet notable sur le nombre de victimes au final, il n’en reste pas moins que :

Seule l’immunité collective met fin à une pandémie virale.


Les partisans des deux camps évoquent avec justesse les arguments ci-dessus (et aussi parfois d’autres un peu moins légitimes). Et de leurs points de vue chaque camp à évidemment raison :

- Si on considère qu’on ne se vaccine que pour assurer sa protection personnelle. Alors il s’agit d’un choix personnel qui prend en compte ses propres facteurs de risques, ses positions idéologiques, ses propres valeurs et ses phobies, les effets secondaires possibles (aucun vaccin n’est sans effets secondaires), les limites de la vaccination en termes de protection (aucun vaccin n’est efficace à 100 %), l’importance qu’on attache à être plus ou moins contaminant (dans le cas du covid, on l’est 9 fois moins quand on est vacciné, mais on le reste) par rapport à son entourage… C’est alors évidemment un choix personnel et l’obligation vaccinale, même déguisée n’a pas de fondement.

- Si on considère qu’on se vaccine pour assurer le plus rapidement possible la nécessaire immunité collective de l’humanité et pour minimiser au maximum le nombre de victimes, alors l’obligation vaccinale devient une évidence. Il serait injuste et amoral qu’une partie de l’humanité se dispense de l’effort collectif, en attendant de profiter de ses bénéfices… (ou pire : j’invoque ma liberté individuelle pour ne pas me faire vacciner, et une fois que les autres ont assuré l’immunité collective et ma sécurité, j’affiche mon mépris pour ces froussards soumis au pouvoir…)

La vraie question n’est donc pas : « faut-il être pro ou anti vaccin ? » puisque la réponse – évidente dans les deux cas - dépend uniquement du point de vue d’où on pose la question. Les deux camps seraient donc irréconciliables.

Mais le vrai choix est celui de la façon dont on se positionne dans la société :

« Faut-il raisonner de façon individuelle ou collective et solidaire. ? »

Là encore chacun peu choisir de se positionner comme il l’entend. Mais cette question en implique une autre :

« le monde qui vient peut-il se passer d’être solidaire ? »

Il semble pourtant que la nature, à travers l’enchaînement de catastrophes naturelles4 auxquelles on assiste, nous hurle la réponse.

La situation actuelle donne raison aux prédictions les plus pessimistes faites il y a des années par des spécialistes dont on se moquait, qu’on disait alarmistes, et qui nous enjoignaient de changer notre mode de vie individualiste obnubilé par notre confort, notre croissance, notre sécurité personnelle, nos profits particuliers et oublieux de l’intérêt collectif. Et le message est clair :

Le XXIe siècle devra devenir solidaire, ou il risque fort de mal se terminer

 

D’une façon ou d’une autre nous sortirons de la crises du Covid, et nous savons que l’humanité y survivra puisque la majeure partie sait fabriquer des anticorps. Même si nous n’en connaissons pas encore le bilan, qui dépendra de nos choix.

Mais à relativement cour terme, nous devrons avoir le courage de penser collectif et en accepter les contraintes. Nous savons maintenant que penser individuel est sans issue.

Le regard que porterons sur nous les générations futures dépendra du nombre d’erreurs que nous ferons avant de le comprendre.




1     https://www.ouest-france.fr/sante/vaccin/traite-de-nazi-apres-la-publication-d-une-video-pro-vaccin-un-medecin-depose-plainte-2f3f7066-edee-11eb-aea8-186d7d8ec172

https://www.leparisien.fr/societe/une-balle-dans-la-tete-ces-medecins-insultes-et-menaces-par-des-anti-vaccins-12-12-2020-8413906.php

2     https://www.amif.com/medecine/france-invasion-medecin-juif-histoire-antisemitisme-medical

3     Les laboratoires annonçaient au lancement des 3 premiers produits 95 %, 94 % et 91 %. Les résultats cliniques semblent meilleurs et font même apparaître pour certains une efficacité quasi totale contre les formes graves.

4     Incendies, inondations, bulles chaudes, désertifications, disparitions d’espèces...

mercredi 14 juillet 2021

Vaccin ou pas vaccin ?

 


A la suite de l’intervention d’Emmanuel Macron, instituant, une sorte d’obligation vaccinale qui ne dit pas son nom, une amie à posté sur les réseaux une liste impressionnante de textes de loi ou règlements français, européens ou confessionnels qui nous protègent d’une telle obligation. Il ne m’est pas venu à l’idée de mettre en doute l’humanité de cette amie et ces dix textes qu’elle publie sont légitimes, importants et nécessaires à mes yeux. Cependant il me semble que la question du vaccin ne peut se résumer à cette vision des choses. Voici en substance (hors des contraintes du réseau en question), ce que je lui ai répondu :


Ton post m’a interpellé. J’avais 11 ans en 1968, j’ai vu mon adolescence bercée par le conformisme bousculé, les libertés acquises, le pouvoir (De Gaule !) remis en question, le droit à la différence, de penser différemment… Et en même temps le discours de nos parents qui avaient vécu, parfois dans leur chair, ce qu’était une dictature, ce que le pouvoir confié à des faibles pouvait faire perdre la tête et conduire au pire. Et en conséquence, la nécessité de toutes ces règles et lois que tu cites.

On ne peut pas, on ne doit pas, fuir les questions que pose l’obligation vaccinale, mais accepter de la poser entièrement. Si nos libertés constituent une valeur fondamentale, notre vie aussi, au moins autant.

- 20 morts dans une Ehpad, contaminés par du personnel non vacciné. Est-ce que le contaminateur (en supposant que, plus jeune, il en ait réchappé) est légitime de se dire devant les 20 cercueils : « J’ai eu raison ! C’est ma liberté ! » ? Ou alors se persuadera-t-il que le mal est venu par un autre non-vacciné ?
- Un autre chiffre vient de tomber. Sur 100 millions d’Américains vaccinés, seulement 10 000 cas de contamination, pratiquement jamais mortelle… Patrick Pelloux en commentant ces chiffres disait : « Avec le vaccin, nous aurions pu éviter les 100 000 morts français… ». Avec la vaccination on peut encore éviter, non seulement quelques dizaines (ou beaucoup plus ?) de milliers de morts par le virus, mais aussi les drames engendrés par l’arrêt de l’économie…

Ceux qui aujourd’hui pestent sur cette obligation à peine déguisée, auraient, de la même façon, tenu le gouvernement pour responsable de ces drames…

Le vaccin est bien sûr destiné à protéger sa propre santé (et là, c’est bien un choix personnel), mais surtout et bien plus, à protéger l’entourage, les autres. C’est d’abord une immunité collective.

Ça me gêne quand, pour assurer l’immunité collective on vaccine aujourd’hui des gamins qui n’en tirent qu’un très faible bénéfice parce que les premiers concernés (plus âgés et à risques) revendiquent leur liberté individuelle.

Ça me gêne quand l’argument libertaire des anti-vaccins vient de gens dont l’emploi (ou la situation financière) et protégé, quand les autres souffrent tant.


Il y a quelques années les limitations de vitesses ont soulevé ce même tollé : « C’est ma liberté ! Qu’est-ce que ça peut vous foutre, si je me fous en l’air à 300 km/h avec ma Porsche ? »… Rien ! Sauf si dans la voiture que tu emboutis où les gens que tu renverses, il y a ceux que j’aime. Sauf si tu comptes sur la société pour prendre en charge les familles que tu laisses. Cette mesure liberticide a sauvé moins les chauffards que leurs victimes !

Dans les années soixante-dix, la ceinture de sécurité a été décriée avec ces mêmes arguments utilisés contre les vaccins, sur l’entrave à la liberté, le droit aux choix individuel. Il y avait 18 000 morts/an sur la route. On est tombé à quelques milliers. La ceinture a réduit de 60 % la mortalité à elle toute seule et on l’enfile aujourd’hui machinalement comme une évidence inhérente à ce moyen de transport. Mais il a fallu passer par une loi « liberticide » (j’ai même pris des PV du fait de ma distraction) !

À la même époque, l’humanité se réjouissait de la « liberté » sexuelle acquise grâce à la pilule, et même grâce au droit à l’avortement, pourtant bien plus objectivement contraignants et conséquents pour le corps des femmes !

Question de regard… et de priorité.


Ceci étant, un minimum de suspicion et de questionnement est non seulement légitime mais indispensable, d’autant que ceux qui commercialisent ces vaccins ne sont pas des enfants de chœur, ni dignes de confiance.

Bien sûr les vaccins anti-covid ne sont pas sans effet secondaires.

Aucun vaccin ne l’est, à commencer par la série de vaccins absorbés dans notre enfance quand le médecin disait à nos parents : « il va peut-être faire de la température, mais c’est normal ».

Bien sûr la communication autour de ces vaccins a été désastreuse, gouvernement compris. Et ça n’est pas simple d’y voir clair.

Mais peut-on encore invoquer le manque de recul après un an de diffusion publique et plusieurs centaines de millions de vaccinés ?

Quand Pasteur a vacciné son premier cobaye mordu par un animal enragé, il lui a sauvé la vie. On était tellement loin des précautions prises aujourd’hui et de nos processus de validation. Pourtant le monde s’est extasié sur sa réussite scientifique et l’avancée pour l’humanité. Personne ne lui a prêté d’intentions cachées.


Le Covid et son vaccin resteront comme un tournant dans l’histoire des réseaux et de la communication tant ils ont déclenché un nombre incroyable de théories et de délires.

- À commencer par ce héros autoproclamé qui avait lu le terme d’« inventeur » du virus sur un document officiel sans en comprendre l’usage habituel dans les publications scientifiques.

- Ceux qui estiment qu’il y a plus de thromboses dans la population vaccinée qu’ailleurs… quand on vaccine seulement les plus de 65 ans !… (1 cas sur 250 000 vaccinés Aztra Zeneca contre 1 cas sur 6 chez les malades du covid...)

- Ces magistrats portugais qui auraient « décidé » que les morts liés au covid seraient uniquement morts de leurs comorbidités et pas du covid (mais n’expliquent pas le pic de mortalité correspondant. Des millions d’euthanasies ?)

- Les affirmations sur des actions secrètes des nanoparticules qui montrent surtout, que leurs auteurs ignorent complètement ce que recouvre ce terme !

- Le complot international mené par Bill Gates et d’autres (même si à bien des égards je n’approuve pas la façon dont Bill Gates veut « sauver le monde » et utilise son argent pour imposer sa vision des choses).

- On aurait certainement dû remplacer le terme scientifique d’ « ARN messager » par « Agent messager extracellulaire » pour le grand public. Ça aurait évité à certains de considérer tous les vaccinés comme des mutants.

Parois le démentis nécessite quelques recherches1, mais le plus souvent ces théories farfelues sont faciles à démonter, mais il est très difficile d’en faire démordre leurs partisans, surtout quand elles sont défendues par des gens ayant bénéficié, un temps, d’une certaine crédibilité.

Didier Raout, pape de la désinformation, dont le scepticisme a largement contribué à lancer toutes ces théories a dit à peu près tout sur le Covid… et son contraire. Sa seule constante - l’efficacité de l’hydroxychloroquine - supposerait à ce stade que la quasi-totalité du corps médical qui en a constaté l’inefficacité serait composée d’abrutis ou de corrompus. Mais ses multiples contradictions, et ces démentis factuels, ne l’empêche pas de conserver ses aficionados.


Alors oui, il est souvent difficile de s’y retrouver. Je n’ai pas confiance dans les labos, ni dans Bill Gates, ni même dans nos gouvernants. Je ne dispose d’aucune garantie sur ce vaccin, juste des constats et les probabilités qui en découlent. Je m’efforce d’accepter les faits et rejeter l’invraisemblable même quand il m’est présenté comme une évidence.

La vaccination devrait rester un choix, mais sur cette base-là, rationnelle, pas sur une flopée de peurs irraisonnées. Ce sont bien ces peurs qui sont le fruit d’une manipulation. Et c’est la manipulation qui nous prive de notre principale liberté : celle de penser.


Et je ne crois pas que la liberté soit du côté des Raout, Trump ou Bolsonaro, qui, il y a peu, niaient la pandémie, et la dictature du côté de ceux qui n’ont pas trouvé d’autres moyens de lutte contre cette pandémie et ne savent que choisir entre désastre ou contrainte.


J’entends et je lis les citations enflammées des anti-vaccins du genre : « ceux qui sont prêts à sacrifier un peu de liberté pour sa sécurité ne méritent ni l’un ni l’autre »2, etc... et autres tirades tirées de leur contexte par ceux qui se drapent dans leur dignité en attendant que les autres assurent leur immunité collective.

J’y réponds, moi aussi avec les mots d’un autre3 : « être libre, ce n’est pas seulement se débarrasser de ses chaînes, c’est vivre d’une façon qui respecte et renforce la liberté des autres ».


Mais tu as raison.

Je souscris à chacun des articles de loi, arrêts et principes que tu cites. Mon parcours personnel laisse, je pense, peu de doutes sur ce que j’ai été prêt à sacrifier pour garder mon indépendance. Je chéris autant que toi cette liberté que chantait Paul Eluard (même si les écologistes m’empêcheraient aujourd’hui d’écrire son nom partout…).

Et plus que tout il faut constamment veiller à l’enfumage de toutes les formes de pouvoir (à commencer par celui des réseaux sociaux) et rappeler, comme tu le fais, les principes essentiels à notre humanité.

Mais voilà. Il suffit d’interroger n’importe quel acteur du milieu hospitalier pour savoir que cette pandémie est une réalité. Plus le virus dure, plus il est susceptible de développer de nouveaux variants difficiles à combattre. Quelles que soient les solutions, le coût humain ou/et social est lourd. Le vaccin a prouvé son efficacité (même Trump a fini par le reconnaître !). Les réfractaires au vaccin ne proposent aucune solution satisfaisante.
(Je ne considère pas « vaccinez les autres pour que moi je ne sois plus en danger » comme une solution satisfaisante.).

J’ai été un peu long, mais j’avais tout ça sur le cœur. Merci de m’avoir donné l’opportunité de le dire.


1https://www.francetvinfo.fr/sante/maladie/coronavirus/vaccin/vrai-ou-fake-on-a-verifie-les-affirmations-des-opposants-aux-vaccins-contre-le-covid-19-lors-de-leur-manifestation-a-nancy_4691841.html?xtor=SEC-735-[08_07_2021_franceinfo_On_a_verifie_les_affirmations_des_opposants_aux_vaccins_contre_le_Covid_19_lors_de_leur_manifestation_a_Nancy]-[3760001%7C%7C6246476558581]-[On_a_verifie_les_affirmations_des_opposants_aux_vaccins_contre_le_Covid_19_lors_de_leur_manifestation_a_Nancy]-[]-[6246476558581]-[]&fbclid=IwAR1yAuTz1D-wbeCbRN7kwY9vXuNz2W6OWZ4nFvA573jS8szkjunzL0QPWgk

2Benjamin Franklin

3Nelson Mandela