jeudi 12 novembre 2020

Quand les religions s’égarent...

Nous vivons une période particulière où les relations entre l’humanité et les religions deviennent difficiles. Et quand j’ai écrit « La Prophétie d’Aïzan » il y a deux ans, je pensais bien que ce serait de plus en plus, un sujet d’actualité, mais j’espérais de façon moins dramatique. 

Quand j’entends que plus de la moitié des jeunes musulmans de France pensent que la charia devrait influencer les lois françaises, l’agnostique laïc que je suis s’insurge !


- D’abord parce que les lois de la républiques doivent être inspirées par le bien-être des citoyens et les nécessités de la vie en société, en aucun cas par les croyances mystiques des uns ou des autres (surtout des autres!)
- Ensuite parce que la charia est, à bien des égards, incompatible avec les droits de l’homme (liberté d’expression, droits des femmes, etc.).
- Enfin, parce que la charia1 ne fait pas partie de l’Islam originel. Seul le Coran peut prétendre refléter l’enseignement du Prophète. La charia est un ajout qui lui est largement postérieur, supervisé par les pouvoirs temporels et politiques qui ont utilisé la religion. Son utilisation relève donc d’une interprétation politique de la religion et d’un choix non-implicite à la religion musulmane


La religion chrétienne ne fait pas mieux. Ses « canons » et son dogme ayant été définis trois siècles après les enseignements du Christ2 sous l’égide d’un pouvoir politique désireux de se munir d’une religion d’état…

Mais de ce côté là aussi on estime souvent que la religion devrait exercer une forme d’autorité sur notre société laïque. Récemment, alors qu’il commentait les événements tragiques qui ont endeuillé la communauté chrétienne et au-delà à Nice, l'archevêque de Toulouse, Robert Le Gall, estimait que "on ne peut pas se permettre de se moquer impunément des religions"3

Si ces mots s’adressaient à la communauté qui reconnaît son autorité alors c’est une affaire entre Chrétiens et ces paroles n’ont pas de portée particulière. Mais il parle alors sur une chaîne publique (France Bleue) et hors de sa communauté, le citoyen Le Gall n’a pas plus d’autorité que le boulanger du quartier. Il peut exprimer ce qu’il pense, et ses croyances personnelles – c’est même un privilège de notre laïcité et de notre liberté d’expression - mais pas déterminer ce qu’« on » (vous et moi) peut se permettre...

Quand il suggère qu’on ne peut pas blasphémer « impunément » Robert Le Gall cautionne l’intolérance des musulmans radicaux. Bien sûr, il n’appelle pas à la violence, mais qui sera chargé des « punitions » ? La loi laïque ? La Charia ? L’inquisition ?
Les punitions qu’il évoque explicitement, sont-elles compatibles avec son discours pacifiste ?

Ça n’est pas aux critiques et aux moqueurs de se taire. C’est aux religions de reprendre leur place : des croyances personnelles.

L’archevêque, ne s’en tient pas là, et s’efforce de profiter de l’émotion provoquée par le drame et de son accès aux médias pour vendre sa marchandise. Dans le même interview, il déclare que : « La religion est essentielle, c'est une dimension humaine. »

Non Robert Le Gall, la religion n'est pas "essentielle". Partout où elle s'est imposée les sociétés ont été freinées dans leur développement (que n’a t-elle condamné tout à tour, l’astronomie, la médecine, la chimie, le développement personnel… et la liberté d’expression!), voire ont régressé. Par contre la liberté d'expression, elle, est essentielle. Partout où elle existe les sociétés avancent, développent, cherchent et trouvent. Même si le progrès n'est pas toujours irréprochable, son accélération fulgurante (comme la naissance de démocraties) de ces deux derniers siècles s'accompagne toujours de la perte d'influence des religions et de l'accès à la liberté d'expression.

La religion n'est pas non plus une "dimension humaine". La spiritualité est une dimension humaine, le dogme religieux son handicap

Il peut être sain (sans « t »!) de tourner en dérision les errements des religions, à chaque fois qu’un échantillon de l’humanité se prend les pieds dans le tapis au nom d’un dieu quel qu’il soit.
J’aurais probablement dû remplacer cette rubrique par quelques dessins caricaturaux bien sentis, mais je suis un piètre dessinateur, et je dois bien l’avouer (mais il me sera beaucoup pardonné) que vous m’avez fâché Monseigneur.


1Le terme n’est utilisé qu’une fois dans le Coran, Sourate 45, verset 18, sans y être plus explicité.

2Concile de Nicéé

3https://france3-regions.francetvinfo.fr/occitanie/haute-garonne/toulouse/declaration-polemique-archeveque-toulouse-on-ne-peut-pas-se-permettre-se-moquer-impunement-religions-1889508.amp?__twitter_impression=true